Édito
En tant que amateur du septième art, les années 90 représentent pour moi une période d'or, surtout en ce qui concerne la mythologie entourant anges et démons. Cette décennie a vu ces entités célestes et infernales capturer l'imaginaire collectif à travers une variété de genres cinématographiques, des thrillers haletants aux comédies en passant par des films d'horreur qui ont laissé leur marque indélébile sur le cinéma.Je vous propose ici de découvrir la sélection de ceux qui m'ont marqué et d'entrer dans un voyage cinématographique entre Ciel et Enfer.
Découvertes Diaboliques: "L'Associé du Diable" (1997)
Dans "L'Associé du Diable" (1997), la dualité entre la tentation et la morale est brillamment mise en scène. Ce film, réalisé par Taylor Hackford, plonge dans l'univers impitoyable du droit avec un twist métaphysique saisissant. Al Pacino, incarnant John Milton, le chef d’un prestigieux cabinet d’avocats et en réalité Satan lui-même, offre une interprétation magistrale, mêlant charisme et menace. Keanu Reeves joue Kevin Lomax, un avocat ambitieux qui, malgré une série de victoires judiciaires, va découvrir le coût réel de ses succès.
Pacino a envisagé Satan non pas comme un monstre hurlant, mais plutôt comme un charmeur, quelqu'un qui séduit plutôt qu'il n'effraie. Cette interprétation a été clé pour offrir une dimension plus profonde et plus nuancée à son personnage.
Une autre anecdote révèle que Keanu Reeves a accepté de baisser son cachet habituel pour permettre à Al Pacino de rejoindre le casting. Ce geste montre l'engagement de Reeves envers le projet et son désir de travailler avec Pacino, qu'il admirait profondément.
Quand le Sacré Rencontre le Profane: "Stigmata" (1999)
"Stigmata" (1999), réalisé par Rupert Wainwright, est un film qui mérite une attention particulière pour sa manière audacieuse de mêler le spirituel au thriller horrifique. Patricia Arquette y incarne Frankie Paige, une coiffeuse athée qui, inexplicablement, commence à expérimenter les stigmates, les cinq plaies du Christ. Ce film n'explore pas seulement les miracles, mais s'attarde aussi sur les réactions de l'Église, représentée par le Vatican qui cherche à étouffer ou à contrôler les manifestations surnaturelles qu’elle ne peut expliquer.
Rupert Wainwright a voulu que les scènes de stigmates soient aussi réalistes et troublantes que possible, ce qui a nécessité des effets spéciaux complexes et parfois douloureux. Patricia Arquette a dû endurer des heures de maquillage et des dispositifs spéciaux pour simuler les stigmates, ce qui ajoutait une dimension très réelle à sa performance et à son personnage.
La bande-son du film, composée par Billy Corgan de The Smashing Pumpkins, a également joué un rôle crucial dans l'atmosphère oppressante et mystique du film. Corgan a expérimenté avec des sons et des styles variés pour capturer l'essence du divin confronté au profane, contribuant ainsi à une immersion plus profonde du spectateur dans l'histoire.
"Stigmata" a provoqué des réactions mitigées à sa sortie, certains critiques louant son audace et son approche visuelle unique, tandis que d'autres ont critiqué sa représentation parfois sensationnaliste de la religion. Malgré cela, le film a réussi à captiver un large public, fasciné par l'intersection de la foi, du miracle et de l'horreur.
Au Cœur de l'Horreur: "Candyman" (1992)
"Candyman", réalisé par Bernard Rose, est un film d'horreur sorti en 1992 qui a marqué le genre par son mélange de légende urbaine et de récit social poignant. Le film explore la légende de Candyman, un esprit vengeur qui apparaît lorsque son nom est prononcé cinq fois devant un miroir. L'intrigue suit Helen Lyle, une étudiante en sociologie qui se lance dans la recherche de vérité derrière la légende, se retrouvant piégée dans une série d’événements terrifiants.
Pour rendre son apparition encore plus effrayante, Tony Todd a accepté que de véritables abeilles soient placées dans sa bouche lors de la scène culminante du film. Cette décision a non seulement intensifié le réalisme de la scène, mais a également démontré l'engagement extrême de l'acteur pour son rôle. Todd était protégé par un revêtement spécial dans sa bouche pour empêcher les abeilles de descendre dans sa gorge, mais il risquait tout de même des piqûres, ce qui s'est effectivement produit à plusieurs reprises.
Bernard Rose, le réalisateur, a adapté "Candyman" d'une nouvelle de Clive Barker intitulée "The Forbidden". Rose a transposé l'histoire de l'Angleterre au quartier de Cabrini-Green à Chicago, utilisant le cadre pour aborder des thèmes plus profonds tels que les inégalités raciales et la violence urbaine, enrichissant ainsi le film d'une dimension sociale qui va au-delà de la simple peur.
À sa sortie, "Candyman" a été salué pour son approche innovante du genre horrifique, intégrant des éléments de critique sociale tout en maintenant une atmosphère suffocamment inquiétante pour captiver les fans d'horreur. Le film a non seulement réussi à effrayer les spectateurs, mais il a aussi invité à une réflexion sur les légendes urbaines et leur pouvoir sur les communautés marginalisées.
Le succès de "Candyman" a également ouvert la voie à plusieurs suites, bien que peu aient atteint l'impact culturel de l'original. La performance de Tony Todd est devenue emblématique, et son personnage de Candyman reste l'un des méchants les plus mémorables du cinéma d'horreur.
Quand Horreur et Apocalypse se Rencontrent: "La Fin des temps" (1999)
"La Fin des temps", sorti en 1999, a marqué la fin d'une décennie fascinée par l'apocalyptique et le surnaturel. Ce film mêle horreur et action en plaçant Arnold Schwarzenegger dans un combat contre le mal incarné, juste avant le tournant du millénaire. Dans ce thriller, Schwarzenegger incarne Jericho Cane, un ancien policier devenu garde du corps, qui se trouve être la dernière ligne de défense contre une conspiration visant à permettre au Diable de régner sur Terre.
Arnold Schwarzenegger, connu pour ses rôles dans des films d'action, a abordé ce rôle avec une intensité particulière, conscient de l'enjeu dramatique de son personnage qui lutte non seulement contre ses démons personnels mais aussi contre le Diable lui-même. L'acteur a travaillé étroitement avec le réalisateur Peter Hyams pour développer une profondeur émotionnelle et physique pour Jericho Cane, différente de ses précédents rôles.
Une anecdote notable du tournage concerne la scène où Schwarzenegger devait traverser un tunnel rempli de débris et d'eau, simulant une explosion cataclysmique. La scène a dû être tournée plusieurs fois, Schwarzenegger insistant pour effectuer lui-même la majorité des cascades, augmentant le réalisme et l'intensité de la scène.
La musique du film, composée par John Debney, joue également un rôle crucial en amplifiant l'atmosphère apocalyptique et le suspense. Debney a intégré des éléments chorals et orchestraux pour donner une dimension presque biblique au score, correspondant à l'ampleur de l'affrontement entre le bien et le mal.
La suite d'un classique: "The Exorcist III" (1990)
Un autre classique du genre, "L'Exorciste, la suite" (1990), plus connu sous son titre original "The Exorcist III", est une oeuvre marquante qui s'éloigne du premier film tout en maintenant un lien narratif. Ce troisième volet, dirigé non pas par William Friedkin mais par William Peter Blatty, l'auteur du roman original "L'Exorciste", explore les profondeurs du mal avec une approche renouvelée. Le film se concentre sur le personnage du Père Kinderman, joué par George C. Scott, enquêtant sur une série de meurtres rituels qui semblent liés à des événements du premier film.
Initialement, William Friedkin devait diriger cette suite, mais des différends créatifs ont conduit William Peter Blatty à prendre la barre. Blatty avait une vision très précise pour cette suite, souhaitant se concentrer davantage sur les aspects psychologiques et mystérieux du mal que sur les démonstrations graphiques de possession démoniaque.
Le film est célèbre pour une scène en particulier, souvent citée parmi les moments les plus effrayants du cinéma : la scène de l'hôpital. Cette scène, qui implique une longue prise continue dans un couloir d'hôpital silencieux suivi d'un soudain sursaut d'horreur, a été méticuleusement planifiée. Le timing et l'éclairage spécifiques ont été conçus pour maximiser la tension et surprendre le spectateur, une technique qui a prouvé son efficacité par la réaction forte du public.
Une Satire Religieuse Audacieuse: "Dogma" (1999)
"Dogma", réalisé par Kevin Smith en 1999, représente une approche unique et audacieuse de la mythologie religieuse, mêlant satire, théologie et humour noir. Ce film est centré sur deux anges déchus, joués par Ben Affleck et Matt Damon, qui trouvent un moyen de retourner au Paradis, mais leur plan menacerait de détruire l'existence elle-même. Smith entrelace des éléments de comédie avec des discussions sérieuses sur la foi, le dogme et la religion, faisant de "Dogma" un film aussi provocateur que divertissant.
"Dogma" est notoire pour les controverses qu'il a suscitées avant même sa sortie. En raison de son traitement de sujets religieux sensibles, le film a été la cible de nombreux groupes religieux qui l'ont critiqué pour blasphème. Kevin Smith a rapporté avoir reçu des menaces de mort et le studio derrière le film, Miramax, a finalement choisi de le vendre à Lionsgate pour éviter les retombées.
En dépit de ces défis, le tournage de "Dogma" comportait des moments plus légers, notamment grâce à la dynamique entre le casting composé d'amis proches et de collaborateurs fréquents de Smith. Le réalisateur a souvent souligné que le film était une affaire de cœur, explorant ses propres questionnements sur la foi, qu'il a injectés dans un scénario riche en humour et en humanité.
Le casting de "Dogma" est particulièrement remarquable, avec des apparitions de Chris Rock, Alan Rickman, et Salma Hayek, ainsi que la célèbre participation de Alanis Morissette en tant que Dieu, un choix de casting inattendu qui a ajouté une touche particulière à la fin du film. Kevin Smith a expliqué que choisir Morissette était une manière de briser les attentes conventionnelles sur la représentation de la divinité.
À sa sortie, "Dogma" a reçu des critiques mitigées, certains louant son esprit irrévérencieux et son audace, tandis que d'autres le trouvaient trop bavard ou critique envers la religion organisée. Cependant, au fil du temps, le film a gagné une base de fans dédiée, appréciée pour sa manière de mélanger le sérieux et le satirique, et pour son approche réfléchie des questions de foi sans perdre son sens de l'humour.
"Dogma" reste un exemple éloquent de la manière dont la mythologie des anges et des démons peut être explorée au-delà des genres traditionnels de l'horreur et du thriller, offrant une perspective qui questionne profondément tout en divertissant. Ce film est un témoignage de la créativité sans limites de Kevin Smith et de sa capacité à engager des conversations sur des sujets complexes avec un ton décalé et accessible.
Une Ode Poétique aux Anges: "Les Ailes du désir" (1987)
"Les Ailes du désir", réalisé par Wim Wenders en 1987, se distingue par son approche lyrique et contemplative de la condition angélique. Le film suit l'histoire de deux anges, Damiel et Cassiel, qui observent les vies des habitants de Berlin, une ville alors divisée par le mur. Touché par les expériences humaines, Damiel désire abandonner son immortalité pour ressentir les joies et les peines de la vie terrestre. Ce film se démarque par sa méditation sur la solitude, le désir et la nature éphémère de l'existence humaine, explorée à travers le prisme des anges qui en sont éternellement témoins mais jamais participants.
Berlin, avec son mur emblématique, n'était pas seulement un décor mais un personnage à part entière dans le film. Wim Wenders a utilisé la division palpable de la ville comme métaphore de la séparation entre le monde des anges et celui des humains. Le tournage dans des lieux réels de Berlin a ajouté une authenticité et une profondeur émotionnelle au film, permettant aux spectateurs de ressentir la mélancolie et l'isolement de la ville divisée.
L'approche visuelle du film est également remarquable. Wenders et le directeur de la photographie, Henri Alekan, ont choisi de filmer les scènes impliquant les anges en noir et blanc, ce qui contraste avec les couleurs vives utilisées pour les scènes du monde humain. Cette distinction visuelle renforce l'idée de la séparation entre le céleste et le terrestre et souligne le désir de l'ange Damiel de faire partie du monde coloré des humains.
"Les Ailes du désir" a reçu un accueil critique extrêmement positif lors de sa sortie, salué pour sa poésie visuelle et narrative. Le film a remporté de nombreux prix, dont le prix de la mise en scène au Festival de Cannes, consolidant la réputation de Wim Wenders en tant que réalisateur de premier plan. Son influence s'étend au-delà du cinéma, inspirant des œuvres dans d'autres médias, y compris le remake hollywoodien "La Cité des anges".
Au-delà de son esthétique et de sa narration, "Les Ailes du désir" est souvent célébré pour sa capacité à capturer l'essence de l'humanité. Les dialogues, souvent sous forme de monologues internes entendus comme des prières ou des pensées, donnent un aperçu intime des préoccupations et des rêves des personnages, offrant une réflexion profonde sur ce que signifie être humain.
Wim Wenders a créé un film qui continue d'émouvoir et de provoquer la réflexion, prouvant que le cinéma peut transcender la simple narration pour toucher à quelque chose de profondément universel et éternel.
Un Ange Pas Comme les Autres: "Michael" (1996)
"Michael", réalisé par Nora Ephron en 1996, offre une interprétation charmante et décalée de la figure angélique à travers le personnage joué par John Travolta. Dans ce film, Michael n'est pas votre ange ordinaire : il boit, fume, et a un penchant pour les femmes et la danse. Ce traitement non conventionnel d'un ange apporte une fraîcheur et une humanité à un sujet souvent traité avec gravité. Le film explore les thèmes de la rédemption, de l'amour et de la joie de vivre à travers les aventures terrestres de Michael, qui aide les personnages à redécouvrir les plaisirs simples de la vie.
Pour se mettre dans la peau de ce personnage peu orthodoxe, Travolta a dû adopter un style de vie légèrement différent, apprenant à dépeindre un personnage céleste avec des défauts terrestres convaincants. Travolta a également participé à des chorégraphies de danse complexes, notamment pour une scène mémorable où Michael danse dans un bar, ajoutant à son personnage une dimension joyeuse et énergétique.
La directrice Nora Ephron, connue pour son approche nuancée des comédies romantiques, a abordé ce film avec l'intention de mélanger humour, romance et éléments spirituels de manière équilibrée. Elle a réussi à créer une atmosphère à la fois légère et profondément touchante, capturant l'essence des interactions humaines enrichies par la présence d'un ange.
À sa sortie, "Michael" a rencontré un succès commercial, attirant un large public avec son mélange de comédie et de drame. La performance de John Travolta a été particulièrement saluée pour sa capacité à apporter une profondeur inattendue à un rôle potentiellement unidimensionnel. Le film a aussi été noté pour son traitement original de la figure de l'ange, éloigné des représentations traditionnellement pures ou mystiques.
La bande-son du film, qui inclut des chansons telles que "Chain of Fools" et "Feels So Good", joue un rôle clé dans la création de l'ambiance joyeuse et parfois mélancolique du film, renforçant les thèmes de la célébration de la vie et des secondes chances.